• Avec ces dernières paroles, il partit, la blessée dans les bras. Donc, il ne fallait pas faire intervenir Lukas ? Je devais aussi parler à Jess, Shiro et Kuro quand je sortirai.

     

    Je remontai rapidement l’aile des quartiers pour me retrouver à nouveau aux escaliers. Je fis alors chemin vers le laboratoire. Je n’avais pas une bonne notion du temps mais il devait au moins s’être écoulé trente minutes.

     

    Il y avait plusieurs salles les unes à la suite des autres. Aucun fantôme à l’horizon. Je devais trouver où Alex était. D’ailleurs, la porte de l’une des dernières pièces, l’une des plus grandes aussi, était ouverte. J’y entrai et, effectivement, il était là devant deux petits conteneurs à l’allure étrange.

     

    - Tu les as trouvés ?

     

    Il se retourna vers moi, surpris. Il ne devait pas m’avoir entendue arriver. Il fronça ensuite les sourcils et sembla plutôt inquiet.

     

    - Ton bras !

     

    Il le prit doucement et je me souvins à cet instant que j’avais été blessée. En regardant bien, le sang ne semblait plus trop couler pourtant la plaie me faisait encore mal. Trois griffures distinctes déchiraient mon avant-bras. La peau était en lambeaux. Alex déchira un bout de sa veste pour envelopper ma blessure.

     

    - Ça va aller ?

    - Oui, c’est bien eux ?

    - Définitivement. Je mes entends.

     

    Dans le milieu des conteneurs flottaient deux sphères translucides. L’une bleu, l’autre argenté. Un brouillard de même couleur était présent dans tout le récipient à peine plus gros qu’une tête.

     

    Dès que je posais ma main contre le verre, une sensation familière se propagea dans tout mon corps et je compris. C’était Tyan dans ce cylindre.

     

    - C’est bien eux.

    - Et toi Lana ? Qu’as-tu été trouver ?

    - La vérité. Enfin, je te ferais lire dès qu’on sera sortis d’ici !

     

    Je me saisis du récipient devant moi. J’espérai ne plus jamais avoir à revenir dans cet endroit. C’était horrible. Cette épave de la base avait été théâtre de trop de souvenirs, d’histoires inachevées et qui ne seraient jamais finies.

     

    On croisa encore deux fantômes que l’on n’eut aucun mal à esquiver. Une fois hors de la cave, on se fit interpeller par un Jess plus remonté que jamais.

     

    - Suis-moi à l’infirmerie.

     

    Il m’agrippa par le bras et je lâchai un cri. Le tissu recouvrant mon avant-bras s’imbiba aussitôt de sang. Penaud, il défit son emprise tandis qu’Alex lui lançait un regard noir.

     

    - Désolé pour ton … Allons à l’infirmerie.

    - Tu vas me détailler ce qui s’est passé ? Qu’as fait Alban ?

    - Tu verras quand on y sera !

     

    Il m’attrapa par l’autre bras et m’emmena à sa suite, Alex sur nos talons. Ses foulées étaient rapides. Un peu trop. Après les derniers événements et la fatigue qu’ils avaient engendré, j’avais dû mal à suivre.

     

    Jess ouvrit la porte à la volée, me laissant découvrir ce qu’il y avait dans la pièce. Déjà, Tania et Zane étaient là. Comment avaient-ils réussi à être acceptés ? … Bon, je les préférais ici à dans la SP. Mais tout le monde ne partageait pas mon avis.

     

    - Pourquoi vous êtes là ? Vous avez juste-

    - Alex ! Calme-toi, ils ne feront rien. Ce n’est pas le moment de régler tes comptes.

    - Mais … okay. Très bien.

    - Merci.

     

    Plus loin, en face d’eux, je distinguai Shiro et Kuro, inconscients, reliés à plusieurs machines. Ils semblaient … stables ? Je ne pouvais pas vraiment le dire. Et puis, tout au fond de la salle, il y avait Alban.

     

    L’arrière avait été aménagé pour n’accueillir que lui. Il était fermement maintenu contre le mur avec des sangles. Il était aussi relié à un panneau électrique dont je ne connaissais pas l’utilisation.

     

    Bien que ses yeux soient clos et qu’il soit endormi, je pouvais sentir un pouvoir bien trop grand émaner de tout son corps.

     

    - Alors que des ennemis arrivaient, Alban s’est jeté sur eux. On a eu beaucoup de mal à le sortir du combat et à s’enfuir.

    - C’est en effet étrange. Je ne sais pas quoi en dire.

    - Au fait, qu’as-tu sous le bras ?

     

    L’intérieur du conteneur s’était légèrement éclairci et la sphère en son centre avait commencé à s’agiter. Nul doute qu’elle devait sentir son corps proche.

     

    Je saisis un bandage, traita rapidement ma plaie et enveloppa mon bras. Le sang ne semblait plus couler, c'était déjà ça de gagné.

     

    Lukas entra à cet instant dans la pièce, m’apportant la solution au problème. S’il était réellement celui que l’on pensait alors il devait savoir à propos du sang du Destructeur. Et même s’il ne l’était pas, sa capacité devait pouvoir arranger les choses.

     

    - Occupe-toi d’Alban s’il te plaît ! Lui lançais-je en agrippant mon petit-ami et sortant de l’infirmerie.

     

    Je voulais retrouver Ellie et Tyan au plus vite. Je laissai Alex me conduire à eux. Ils étaient dans une pièce spécialement aménagée pour eux. Leurs corps, simplement allongés sur deux lits, n’avaient pas l’air d’avoir changés depuis leur sortie de la SP. Toujours aussi pâles, manquants de vie.

     

    L’étrange fumée avait disparu des bocaux au profil des sphères qui étaient devenues opaques. J’ouvris le mien et je vis du coin de l’œil mon compagnon faire la même chose. Le noyau d’âme roula dans mes mains. Ce n’était pas lourd comme je me l’étais imaginé mais plutôt léger.

     

    - Et maintenant ?

     

    Maintenant ? Je ne savais pas quoi lui répondre. Zane ne m’avait pas indiqué le processus pour les rendre à leurs propriétaires. J’attrapai la main d’Alex par angoisse, sûrement, et l’on s’avança vers nos deux amis.

     

    Il y eut une vibration stridente alors que nous n’étions plus qu’à quelques pas d’eux et les deux sphères s’envolèrent, comme animées d’une volonté propre. La bleue entra dans le corps d’Ellie, l’argentée dans le corps de Tyan.

     

    Une bulle se dressa autour d’eux. Les ondes continuèrent mais ralentirent. Je ne pouvais détourner mon regard du spectacle. Une chaleur nostalgique m’envahit. Tout était parfait, tout rentrait dans l’ordre jusqu’à l’explosion.

    Et je sombrai dans le noir le plus total.

     

    - Oh Alex, Lana, je suis tellement heureuse qu’on soit réunis ici tous les quatre ! J’en ai rêvé pendant si longtemps … déclara Ellie, un sourire enchanté au coin des lèvres.

     

    Maintenant que nous étions tous réunis, j’avais l’impression que ce n’était pas réel. Il y avait eu tant d’années cauchemar. Peu importait. Si c’était un rêve, alors je souhaitais ne jamais me réveiller.

     

    Installés sur la terrasse de notre QG, on étudiait tranquillement le fonctionnement de notre Empire. Il fallait revoir les missions, les admissions et la séparation de l’association au cas où quelque chose venait à nous arriver.

    Alex était un peu distrait. Aucun de nous ne lui en voulait. On savait qu’il lui restait des séquelles et qu’elles seraient probablement présentes jusqu’à la fin de sa vie.

     

    - Bon, je pense qu’on a mérité une pause ! S’exclama Tyan en s’étirant. On va aller voir les autres un peu et on se sera de retour dans une quinzaine de minutes je pense.

     

    Lui et Ellie sortirent de la pièce, nous laissant seuls dans un silence total. Il fallait dire que nous n’avions pas eu l’occasion de nous retrouver en tête à tête depuis que nous étions sortis de la SP.

     

    - Lana. J’ai bien réfléchi et ces années perdues m’ont fait admettre que je ne voulais en perdre une de plus. J’ai souffert mais ici, avec vous, je sens que cette souffrance disparaît. Vous me guérissez.

     

    Je ne pus répondre. Les mots étaient bloqués dans ma gorge. Je savais aussi qu’il n’avait pas fini mais il m’avait vraiment prise par surprise. J’étais clouée par l’émotion. Je ne pensais pas qu’il m’en parlerait, pas maintenant.

     

    - Malgré ça, je sais qu’il n’y a qu’une personne en qui je peux être sûr d’avoir confiance et c’est toi.

     

    Il m’embrassa. C’était notre deuxième baiser mais tellement plus significatif que le premier. Du désespoir et de la souffrance se mélangeait à de l’espoir et de l’amour. Même quand nos lèvres se séparèrent, je restai dans ses bras.

    Notre moment fut interrompu par la porte de la terrasse s’ouvrant.

     

    - Oups. Désolés, on est revenus un peu trop tôt. Tu vois Ellie, je te l’avais dit !

    - Oui mais j’étais trop pressée ! Préparez-vous les deux tourtereaux, on part pour notre première mission !


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  • Mes yeux s’ouvrirent doucement alors que j’émergeai du choc. La salle était en feu tout autour de moi. Je toussotai à cause de la fumée avant de me rendre compte que plus personne n’était dans la pièce. Ils avaient tous disparu.

     

    Je sortis dans le couloir à l’aide du mur, dont je prenais appui pour calmer mes vertiges. L’extérieur n’avait presque, ou pas, subi de dégâts. Je m’effondrai au sol, les yeux clos, pour calmer ma respiration et mon esprit.

     

    Les sifflements dans mes oreilles s’atténuèrent jusqu’à disparaître totalement.

     

    - Lana ?! Ça va ?

     

    J’ouvris les yeux et découvris Zane face à moi. Pourquoi était-il là et pas auprès de Tania ? Il me releva doucement et passa mon bras sur ses épaules.

     

    - Je crois que oui. L'explosion m'a bien sonnée.

    - Les deux Empereurs étaient affolés pourtant.

     

    De qui parlait-il ? De Ellie et Tyan, Ellie et Alex ou Alex et Tyan ? Peu importe qui, il manquait quelqu'un. Que lui était-il arrivé et où était-il ? Faisant fi de mes préoccupations, Zane me traîna jusqu'à l'infirmerie. Et Alex n'était pas là.

     

    Je ne cachai quand même pas ma joie de voir Ellie et Tyan bien en vie et leur sautai au cou.

     

    - Où est Alex ?

    - Il a été enlevé par quelque chose, je ne sais pas trop quoi, je l'ai juste senti. Il y avait cette espèce de présence et quand je me suis réveillée, elle est partie.

     

    Je promenai mon regard dans la pièce. Lukas, Jess et Alban avaient disparu eux aussi. Shiro et Kuro étaient toujours allongés mais réveillés. Tania était, elle, levée comme déjà guérie. Je faisais de mon mieux pour distraire mon esprit et l'empêcher de revenir vers Alex. C'était très dur, je n'y arrivais pas trop.

     

    On ne nous accordait toujours pas le droit d'être tous réunis ! Il fallait que quelque chose d'autre arrive encore. Nouvelle menace, nouvelle disparition. Je poursuivais ce destin ridicule.

     

    Tyan dût sentir que j'étais à bout de nerf car il me prit dans ses bras.

     

    - Hey Lana ? Je sens qu'on devait te le dire encore mais on te remercie, Ellie et moi. Peu importe combien de fois on te remerciera, ce ne sera pas suffisant. Tu nous as sauvé. Je sais que tu es à bout mais on a besoin de toi pour sauver Alex alors tiens encore un peu.

     

    Je pris une longue inspiration pour me calmer et me retirai de son étreinte. Je m'apprêtai à lui répondre quand je fus interrompue par l'arrivée soudaine de Lukas.

     

    - Jess et Alban se battent, je n'arrive pas à les arrêter !

     

    Pourquoi ? Comme si on avait le temps pour ça. Je sortis de l'infirmerie pour arriver rapidement où se trouvaient les deux. Deux tables avaient été renversées, la plupart des gens avait quitté la salle et ils étaient en son centre. Ils se rendaient coup pour coup.

     

    Cette vision me fendit le cœur.

     

    Comme ils en étaient venus aux mains, je m'interposai juste entre eux. Si Alban s'arrêta immédiatement, Jess avait déjà avancé son mouvement et je me pris son poing dans mon bras qui émit un bruit inquiétant.

     

    Le sang imbiba le pansement ; ma plaie s'était rouverte. La douleur se répandit très vite dans tout mon membre et je serrai les dans pour ne pas crier.

     

    - Oh ! Je suis désolé Lana ! S'écria Jess, horrifié.

    - Ça va. Juste … n'y touchez pas.

     

    Je respirai longuement et fermai les yeux pour tenter de faire abstraction de la douleur. En ouvrant mes paupières, je fixai mon regard sur Jess et Alban.

     

    - Pourquoi vous battez-vous ? N'avez pas idée des batailles, des grandes batailles, qu'ils vous restent à mener ? Ne vous laissez pas emporter par la discorde, ce n'est pas le moment !

     

    Ils baissèrent les yeux, honteux et penauds. Je me détournai d'eux et me dirigeai vers l'infirmerie à nouveau. Je n'avais même pas eu la raison de leur conflit. Tant pis. Combien de temps s'était écoulé depuis que je m'étais évanouie ?

     

    - Lana ! J'ai vérifié les caméras de l'entrée et ceux qui ont enlevé Alex sont des espèces de fantômes. S'exclama Lukas à peine j'entrai dans la pièce.

    - Ah. Calys, peux-tu soigner mon bras ?

    - Laisse-moi voir ça.

     

    Elle saisit délicatement mon avant-bras avant de le poser sur une table et d'enlever le bandage.

     

    J'avais le sentiment que quelque chose s'était mis en place à partir du moment où l'on avait ouvert l'ancienne base ainsi que ses sombres secrets. Et là, mes soupçons étaient confirmés. Les « fantômes » qui s'y trouvaient en étaient sortie.

     

    Pas tout seuls, c'était certain. Quelqu'un avait réussi à diriger ces coquilles vides. N'était-ce pas censé être impossible ? Cet inconnu avait su trouver la base juste en-dessous de la notre. Était-ce une coïncidence, un membre de l'Alliance ou de la SP ?

    Soit je faisais fausse route soit c'était à nouveau une trahison. Je le sentais déjà. Je tenais ma réponse mais ne voulais pas y penser. C'était toujours douloureux.

     

    - Lana, reprit Tyan en entrant dans l'infirmerie suivi d'Ellie, on a la réponse et elle risque de ne pas te plaire. Les auteurs du kidnapping se nomment Carole et Yan, je crois que tu les connais bien.

     

    Oui. C'était ça la réponse malheureusement. Je ne pouvais connaître leurs réels motifs, impossible à deviner. Je l'avais quand même pressenti. Une rupture à l'intérieur de mon Empire. D'ailleurs, Liska était sûrement au courant.

     

    Ils avaient dû vouloir qu'elle vienne avec eux et elle avait dû refuser par principe, trop attachée à ce qu'on avait bâti depuis le début, depuis qu'elle était arrivée.

     

    - Aie !

    - Ne bouge pas ! S'écria Calys avec parcimonie. Tu n'as rien de cassé mais la plaie est enfoncée jusqu'à l'os avec la réouverture alors reste tranquille ! C'est très délicat.

     

    Je soupirai. La douleur s'apaisait ou du moins j'en avais l'impression. Maintenant, il me fallait les raisons concrètes. Pourquoi être partis et surtout, pourquoi avoir emmené Alex ? Comptait-il sur lui en tant qu'otage ?

     

    - Lukas, tu n'as rien vu d'autre ?

    - Non. Ah et j'ai oublié de te dire que le chef du Clan et celui de l'Association veulent te voir.

     

    Je hochai la tête, pensive. Pourquoi moi et seulement à présent ? Ils auraient pu vouloir me voir plus tôt ou même jamais. Jusqu'à présent, je ne leur avais jamais parlé. La correspondance s'était toujours faite via Edgar et Clara.

     

    Alors j'allais rencontrer en personne Clement Asis et Dylan O'ren, ceux à la tête de l'Alliance. Si je me souvenais bien, Clement, qui dirigeait l'Association, était un peu plus jeune et moins expérimenté que Dylan, le chef du Clan.

     

    Tous les deux étaient d'excellents dirigeants alors réunis ensemble, ils prenaient la tête de l'une des organisations les plus puissantes au monde. Leurs compétences de combat étaient apparemment très élevées mais peu de personnes connaissaient leurs capacités. Je n'en faisais pas partie.

     

    J'eus du mal à trouver leur porte, faute à mon sens de l'orientation pas opérationnel cette fois-ci. Je dois dire que la pièce était joliment décorée. Des tableaux de grand art, des objets raffinés, un élégant bureau en marbre et derrière deux fauteuils en cuir à l'allure confortable. J'en passai.

     

    Je n'avais jamais trop étudié leur apparence et ne les avais jamais vraiment vus aussi. Ce fut seulement maintenant que je remarquai la mèche bleue dans les cheveux châtains de Dylan et les étranges iris de Clement à l'allure d'étoile.

     

    Ils n'avaient pas des carrures énormes mais ils dégageaient une sorte d'aura vraiment imposante. J'avais une légère impression d'étouffer. Je sentais que leurs intentions n'étaient pas dénuées d'hostilité à mon égard.

     

    - C'est bien toi que j'avais mis sur une mission de sauvetage, celle de Clara ?

    - Oui. Pourquoi ?

    - Rien … on devait juste confirmer quelque chose. Tu peux y aller.

    - Attends. Dyl a oublié de te dire quelque chose. Si tu pars à la recherche d'Alex, préviens-nous.

     

    Ils agissaient de manière étrange. Pourquoi se mêlaient-ils de nos affaires, se souciaient d'Alex maintenant ? Toute cette histoire avait quelque chose à faire avec eux, particulièrement avec Yan et Carole. Peut-être avec leur passé ? Je ne le connaissais pas du tout. Cela avait aussi à voir avec le passé de Clara.

     

    Je m'adossai à la porte à peine sortie dans l'espoir d'en entendre un peu plus.

     

    - Si c'est comme on le pensait et que c'est eux …

    - C'est eux. On n'y peut rien. On a déjà assez payé pour ça. On était jeunes, on a même pris vengeance de toutes ces affaires.

    - Je ne voulais plus jamais faire équipe avec toi. Qui aurait cru qu'on serait réunis encore ?

    - D'ailleurs, je me souviens que tu avais été si heureux qu'on-

     

    Je me détournai de la conversation.

    Que s'était-il réellement passé cette nuit ? Pourquoi n'avais-je pas été un peu plus curieuse ?

    Je repassai au réfectoire. Avec tout ça, j'avais oublié l'autre découverte dans l'ancienne base de la SP, la mort des parents de Jess, Kuro et Shiro ainsi que les deux lettres. Il était temps qu'elles reviennent à leurs destinataires.

     

    - Avez-vous fini de vous battre ? Je dois parler à Jess.

    - Oui, je suis là, c'est à quel sujet ?

    - À propos de ton passé.

     

    Son sourire s'effaça. Brièvement, j'eus le temps d'apercevoir une lueur que je connaissais bien. Une vieille cicatrice ravivée. De la douleur, tristesse, regret et colère. Il murmura à l'oreille d'Alban qui hocha la tête et sortit de la pièce.

     

    Je devais y aller avec précaution, je m'engageai sur un sentier épineux apparemment. Je pris mon ton le plus doux possible avant de continuer.

     

    - Pour trouver les noyaux d'âmes, Alex et moi sommes allés dans l'ancienne base de la SP.

    - Celle en dessous de nous ?

    - Oui.

     

    Y avait-il déjà été pour être au courant de son existence ? Cela me ne surprendrait pas si je l'apprenais et, en même temps, il aurait sûrement déjà trouvé le carnet et les lettres si. Zane avait dû l'évoquer dans son mot.

     

    - Si tu te poses la question, je n'y suis jamais allé.

    - J'y ai découvert un carnet que tu pourras lire après mais le plus important c'est ça.

     

    Je sortis la lettre de ma poche et la lui tendis. Son expression se colora d'une surprise totale. Alors qu'il la saisit, une larme solitaire roula le long de sa joue.

     

    - Tu vas bien ?

    - Je … oui. Je ne m'y attendais pas c'est tout.

     

    Il ouvrit l'enveloppe et déplia rapidement la lettre d'une main tremblante. Il la lut d'une traite avant de la replier. Dire que j'étais pleine de curiosité aurait été un euphémisme.

     

    - Je peux la voir ?

    - Non. Tu n'en auras pas l'utilité. Ou du moins pas maintenant. Me répondit-il, un sourire mystérieux au coin des lèvres. Au fait, ça devrait t'être utile.

     

    Jess me lança un autre bout de papier. C'était une carte mais pas n'importe laquelle. Une carte de la forêt. L'emplacement de la sépulture de Julie et Plutarc. Je n'eus pas le temps de m'extasier davantage car déjà, il tournait les talons.

     

    - Attends ! Où vas-tu ?

    - Retrouver mon frère et ma sœur.


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  • Wow. Je me sentais émue. Je sentais que leurs parents pouvaient enfin reposer en paix alors que leurs enfants allaient être réunis. Vraiment réunis. Je lui tendis la lettre de Nathan et Maelys. Avant de partir, il se retourna vers moi.

     

    - Au fait je suis … Non rien. C'est plus drôle comme ça.

     

    J'avais le sentiment qu'il était sur le point de me dire quelque chose d'important mais quoi ? Le temps que je réfléchisse à ses propos, Jess était déjà parti. Je me glissai dans les bois en essayant tant bien que mal de me repérer avec la carte.

     

    Il me fallut bien une demi-heure pour repérer et baliser le chemin. La clairière était verdoyante et magnifique. La structure en son centre, dont la végétation qui grimpait doucement dessus, ne faisait qu'amplifier la beauté de l'endroit.

     

    Je m'approchai de la statue. Un homme et une femme y étaient représentés s'enlaçant amoureusement. Je posai ma main dessus. À ce contact, le lierre se retira légèrement, laissant une stèle apparaître. En marbre gris bordé d'or, l'inscription était faite en argent.

     

    -Plutarc Nonymac- -Julie Toneski-

    XXXX – XXXX XXXX – XXXX

     

    J'effleurai l'écriture du bout des doigts. Aussitôt, elle s'effaça. De nouvelles lettres apparurent, toujours de la même couleur, elles traçaient un message … qui m'était destiné.

     

    Imperater,

    tu vas rencontrer le destin. Une période est sur le point de s'achever et tu le sais. Un endroit délaissé, tien autrefois, pourrait être ta solution.

     

    - Qui es-tu donc ?

     

    Je ne pus m'empêcher de formuler cette question. Je n'en attendais pas forcément une réponse. C'était juste sorti de manière spontanée.

     

    Tu me connais. Tu ne me connais pas. Je suis partout sauf là où je devrais être.

     

    Quelqu'un qui n'était pas là où il devait être ? Pourquoi mon Impereur semblait si triste à ce propos ? Le connaissait-elle ?

     

    Je suis le Pacificateur.

     

    Par surprise, je reculai ma main. Presque immédiatement l'inscription s'effaça, laissant réapparaître l'épitaphe. Ensuite les lianes la recouvrirent sans que je ne puisse rien y faire. Ma paume se posa à nouveau contre la pierre mais plus rien ne se produisit.

     

    Il n'y avait qu'un seul endroit correspondant à ce qu'il me disait. Partout sauf à un endroit. Sauf à l'endroit qui lui appartenait. Son corps. J'avais perdu une chance inestimable de converser avec lui mais j'avais l'endroit que je cherchais.

    Juste avant de partir, je me retournai une dernière fois vers la statue.

     

    - Merci Pacificateur. Merci Julie et Plutarc. Murmurais-je, les yeux fermés, inclinée avec respect.

     

    Je restai quelques secondes dans cette position avant de me relever et de partir en direction de l'Alliance pour aller chercher mon équipe. En tout cas, j’allais chercher Ellie et Tyan. Les autres, je n’étais pas sûre qu’ils viennent.

    Cette fois-ci, je mis moins de temps ou c’est l’impression que j’eue de mon retour. À peine étais-je arrivée à l’entrée que Shiro et Kuro me sautèrent dessus.

     

    - Hey doucement !

    - Désolés. On était tellement pressés de te voir Kuro et moi…

    - …on voulait te remercier vraiment.

     

    Ils semblaient si heureux. C’était impressionnant et si apaisant. Je les serrai doucement dans mes bras. Ce genre de moment était inestimable.

     

    - Tu vas chercher Alex, pas vrai ? Alors laisse-nous venir avec toi !

    - Je vais y réfléchir.

     

    Fallait-il mieux emmener peu ou beaucoup de personnes ? Je sortis du hall et continuai à avancer dans le couloir. De vives voix se dégageaient du réfectoire. J’y jetai un coup d’œil. Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant Ellie et Tyan attablés avec Clara et Liska.

     

    Plus loin, à l’écart des quatre, Clement et Dylan semblaient plongés dans une conversation profonde et pleine de tensions. Ils la cessèrent sitôt ils me virent arriver et vinrent à ma rencontre.

     

    - On a réuni toute ton équipe. Il ne manquait plus que toi.

     

    Sans moi, on était six. Devais-je accepter des personnes en plus ? Le reste du groupe nous rejoignit et quelqu’un me fonça dedans. Si je restai debout, la personne derrière moi tomba. Je me retournai.

     

    - Alban ?! Qu’est-ce qui t’as pris ?

    - Désolé.

     

    Il se redressa en se tenant la tête. Il ne fallut que quelques secondes supplémentaires pour que Edgar arrive à son tour et ce fut lui qui prit la parole.

     

    - En fait on veut venir avec vous. Je sais que Kuro et Shiro te l’ont aussi demandé mais je pense qu’il vaudrait mieux les laisser profiter de Jess pour le moment.

    - D’accord je te fais confiance.

     

    Et je croyais aussi le regard contrarié que posait à cet instant Clement sur lui. Il avait les lèvres vraiment pincées et il finit par murmurer quelque chose à l’oreille de Dylan sans se douter une seule seconde que je l’observai. Scène bien étrange ?

     

    - Bon, m’exclamai-je, coupant court à tout échange, nous sommes au complet alors nous devrions partir !

    - Tu ne nous as toujours pas dit où ?

    - À notre ancienne base, ma chère Liska !

     

    Elle fut surprise un instant mais se ressaisit bien vite, une détermination de fer sur le visage. On ne mit pas trop de temps ; Liska et moi connaissions le chemin par cœur. Elle était d’ailleurs à notre tête et avançait avec hardiesse. Je suivais son allure, essayant de me positionner à ses côtés.

     

    - Pourquoi y mets-tu autant d’énergie ? Pourquoi es-tu consternée ?

    - Quoi ? Je devrais me sentir blessée parce que mes deux meilleurs amis t’ont trahie, m’ont trahie, et ne m’ont jamais parlé de leurs plans ?

     

    Je réussis à lui attraper le bras et remarquai enfin l’expression qu’elle affichait sur le visage, elle se retenait difficilement de pleurer. Elle semblait bouleversée. On s’arrêta. Les autres étaient derrière, on les avait légèrement distancés, on avait un peu de temps. Son air si confiant n’était qu’une façade.

     

    - Tu sais Lana, c’est horrible. Ce genre de situation, on voit ses proches changer alors, au début, on le nie. Au fur et à mesure, ils s’éloignent et on regrette tellement d’avoir fermé les yeux dessus !

     

    Je lui frottai doucement le dos. Petit à petit, ses respirations saccadées se calmèrent et son corps s’arrêta de trembler. Au moment où les autres nous rejoignirent, elle essuyait le semblant de larmes resté dans ses yeux.

     

    - Tout va bien ? S’enquit Clara avec tendresse.

     

    C’était de la véritable inquiétude qui émanait d’elle à cet instant. Elles étaient devenues amies si rapidement. Liska hocha distraitement la tête et elles se mirent à l’arrière du groupe tandis que les autres membres les observaient. Je tapai dans mes mains avant de m’exclamer :

     

    - Allez, allez ! On se remet en route.

     

    Je continuai à marcher, prenant la tête. Edgar se rangea à mes côtés. Tout d’abord silencieux, il se mit à fredonner un air qui m’était familier.

     

    - Tu sais que cette bataille va conduire à une décision importante ?

    - Euh … oui, sûrement ?

     

    Il me sourit d’un air dédaigneux en secouant la tête, semblant dire « tu ne comprends pas ». À vrai dire je voulais comprendre cependant je n’étais pas sûre de pouvoir. Ed avait plus d’information que moi.

     

    On arriva à l’entrée. Un mauvais pressentiment m’envahit et je me stoppai. Heureusement, tout mon groupe suivit mon exemple. À deux pas devant moi, le sol explosa. Une fille et un garçon arrivèrent ensuite.

     

    Ce n’était pas Yan et Carole. Pourtant ils m’étaient familiers.

     

    La fille avait un visage rond ; de longs cheveux bruns aux pointes bleues qui retombaient sur un manteau argent. Une longue robe marine bordée de fils blancs était visible en-dessous. Ses yeux étaient verts. À son cou pendait un collier avec un dauphin en argent et elle tenait un étrange livre dans ses mains.

     

    Le garçon qui l’accompagnait avait des cheveux argent et des yeux de la même couleur. Il abordait un air triste. Un élégant haut-de-forme d’un gris foncé avec un ruban bleu était sur sa tête. Il portait, au-dessus d’une chemise blanche et d’un pantalon noir, un long manteau de même couleur que son chapeau ainsi que des bottes d’un gris plus nuancé. Dans sa main droite, il tenait un étrange parapluie bleu et argent.

     

    - Il y avait 86% de chances qu’ils meurent. Je vais devoir être plus précise. Possibilité C de la troisième stat’ Jibril.

    - Entendu Gwladys.

     

    Elle griffonna quelque chose dans son manuscrit. Un cercle magique se dessina au sol et, aussitôt, les yeux de Jibril s’illuminèrent.

     

    - Je vois, je vois. Puisque c’est ainsi, « Piège » activé !

     

    Il disparut de mon champ de vision. Je clignai des yeux et il réapparut juste à côté de moi. Il avait une grenade dans la main. Avec un sourire, il l’enclencha et disparut à nouveau. Je pouvais crier pour avertir mes camarades mais ça serait trop tard.

     

    J’étendis ma capacité pour couvrir la grenade de magma. Il durcit tout autour et l’explosion fut contenue. Le temps avait semblé être ralenti pour nous et ce garçon avait été si rapide … il y avait, sans aucun doute, de la manipulation temporelle.

     

    Mes réflexes étaient plus rapides que la moyenne mais je n’étais pas sûre de pouvoir réussir à arrêter la prochaine attaque. En jetant un regard en arrière, je pus voir Dylan, l’air parfaitement serein.

    Il avança, fluide et léger, alors que moi je ne pouvais bouger du tout.

     

    - C’est une capacité fort intéressante en effet. Dommage qu’elle ne marche pas sur moi.

     

    Il y eut un crissement et une vague bleue s’échappa de sa main. Quand elle me traversa, je pus constater à quel point elle était froide. Le temps sembla se ralentir à nouveau mais c’était, d’une certaine manière, plus équitable.

     

    Jibril s’apprêta à se lancer vers Dylan mais Gwladys le retint. En y repensant, cet effet temporel était-il dû à leurs deux capacités ?

     

    - Non. Tu as 90% de chances de défaite. Le combat n’est plus en ta faveur, retirons-nous.

     

    Étonnamment, son camarade se calma, comme par automatisme, et s’apaisa. Ils s’écartèrent pour nous laisser entrer tandis que tout redevenait normal. Je fermai la marche.

     

    - Imperater, es-tu sûre de vouloir entrer ?

     

    Je me tournai vers Gwladys. Elle me fixait d’un air triste, ce qui ne semblait être qu’une couverture. Une étrange satisfaction s’échappait d’elle. Ses yeux verts me transperçaient.

     

    - Tu vas devoir faire un choix. Je vois beaucoup de choses. C’est mon dernier avertissement.

    - J’en ai bien conscience.

    - J’ai bien peur que tu en manques.

     

    Avec un dernier sourire insistant, elle se dégagea de mon chemin et s’installa sur une marche à côté, continuant de griffonner dans son livre. Jibril me fixait aussi, le regard vive, l’air absent. Une véritable poupée d’argile.


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  • Je me détournai et franchis la porte du hall. C’était un véritable foutoir. Des spectres déambulaient dans toute la salle. Bien que les membres de mon groupe tentassent de les combattre, c’était sans grand succès.

     

    - Tout cela commence à m’agacer un peu trop, déclara Clement, l’air douloureusement crispé.

     

    Il leva son bras et ferma les yeux. Le sol trembla doucement. Dylan, l’apercevant ainsi, soupira, posa une main sur sa hanche et l’autre sur son épaule. Il se pencha alors pour lui murmurer à l’oreille :

     

    - Doucement Clem … tout va bien. Je suis là. Calme toi.

     

    Il répéta plusieurs fois ses murmures et le chef de l’Association se calma enfin. Le sol arrêta son tremblement inquiétant et Clement s’effondra dans les bras de son ami.

     

    - Qu’est-ce que c’était ? Ne pus-je m’empêcher de demander.

     

    Dylan sourit doucement face à ma curiosité et, d’un revers de la main, je soulevai la terre pour balayer une ligne de spectres un peu trop proche de nous.

     

    - C’est sa capacité, il appelle les étoiles.

     

    Effectivement. Un premier astre céleste tomba devant nous. Il écrasa plusieurs fantômes. Sa chute avait, elle, emporté une partie du toit.

     

    - Pardon, j’ai réagi un peu tard. Il ne devrait pas y en avoir beaucoup. M’enfin, Clement est imprévisible parfois. J’arrive à calmer mon partenaire heureusement car il s’épuise trop vite. Son pouvoir lui prend toute son énergie.

     

    Il avait raison car seulement deux comètes de plus s’écrasèrent.

     

    J’avais retenu une information intéressante : les deux chefs se connaissaient avant de le devenir. Y avait-il déjà eu une alliance entre l’Association et le Clan ? Et si c’était le cas, pourquoi personne n’était au courant ?

     

    Malgré les importants dégâts matériels qu’avaient causé les astres, les spectres surgissaient de sous les roches assez facilement. Cela ne semblait leur faire aucun effet.

     

    - Lana ne devrions-nous pas essayer ? Demanda alors Ellie, incertaine.

    - Le troisième sceau ? Eh bien … oui.

     

    Nous posâmes nos mains les unes sur les autres pour garder notre lien et avoir l’emprise totale sur nos Impereurs. Je sentais l’air changer tout autour et les yeux des membres de notre groupe rivés sur nous. Les éléments commençaient à s’affoler.

     

    - Terre

    - Air

    - Eau

    - [Accordez nous les LOIS DE LA PLANETE]

     

    Trois ondes parcoururent l’entière pièce et les murs tremblèrent tandis que trois piliers sortaient du sol, entourant la totalité des spectres présents dans le hall. Les colonnes se relièrent d’un trait lumineux et au centre même de cet arrangement une boule se forma.

     

    Ma tête et ma poitrine me faisaient mal. Je devais résister mais pourquoi y avait-il une telle douleur présente ? Les deux autres sceaux ne m’avaient fait endurer aucune souffrance, juste de la fatigue.

     

    Tandis que cette fois, chaque mètre que la boule réussissait à couvrir en plus me semblait comme un coup que je prenais. Quand elle eut absorbé le dernier fantôme, elle se résorba d’elle-même et disparut en même temps que les piliers, laissant un trou dans le sol.

     

    La douleur elle-aussi disparut.

     

    -C’était plus … douloureux que dans mes souvenirs. Souffla difficilement Tyan, une grimace sur le visage.

    - Oui, c’est étrange. J’ai la sensation que ça n’aurait pas dû être ainsi.

     

    Le passage qui menait à la porte du fond – donc à l’endroit où se trouvaient Yan, Carole et Alex – était à présent dégagé. Clement avait repris conscience et s’appuyai sir Dylan avec difficulté.

     

    On entra dans la salle.

     

    Il faisait sombre, beaucoup trop sombre pour que l’on puisse distinguer quoique ce soit. Soudainement, une lumière s’alluma. Ou plutôt, une vidéo apparut sur le mur. Quatre personnes apparurent. Chaque silhouette d’une couleur différente ; l’une bleue, jaune, rose et la dernière orange.

     

    - À une certaine époque, deux familles revinrent s’installer dans la petite ville.

    - Bien sûr, ces deux clans étaient ancestraux et avaient leurs racines dans cette cité.

    - Cependant, le Clan et l’Association n’étaient pas d’accord avec ce retour.

    - Les deux familles composaient une seule et même organisation nommée « Le Serpent ».

     

    En me rappelant bien, Yan avait un serpent dans le dos. Enfin, je ne l’avais vu qu’une brève seconde quand il était à l’infirmerie. Sur l’écran, l’orange et le rose se réunissaient en un beige.

     

    - Seule les deux familles principales du clan possédaient des capacités et celles-ci étaient transmises de génération en génération.

    - Le Serpent prenait de plus en plus de place sur le marché. Alors l’Association et le Clan formèrent leur première alliance et…

     

    La silhouette bleue et la jaune fusionnèrent en une verte qui se multiplia. Elles encerclèrent ensuite le beige et se resserrèrent autour de ce dernier. L’image coupa à cet instant précis.

     

    - Et maintenant notre grande question ! Qu’est-il arrivé au Serpent ?

    - Peut-être des idées … Clement et Dylan ?

     

    Yan et Carole apparurent, descendants le grand escalier à notre gauche. Ils étaient tous les deux habillés d’étranges tenues mais le bas avait quelque chose en commun ; un serpent. Ils portaient des masques de carnaval sur le haut de leurs visages.

     

    Si Carole avait dégagé ses longs cheveux roux flamboyants de son impeccable natte habituelle, Yan à travers son masque avait mis en valeur ses iris magentas. Ils évoquaient quelque peu la silhouette rose et orange de la projection plus tôt.

     

    - Cessez cette mascarade ! Grogna brusquement Liska. Rentrons à la maison …

    - La maison ? Ta maison plutôt. Ça n’a jamais été à nous.

     

    Liska se décomposa et je vis Yan tressaillir. Peut-être qu’il ne voulait pas la blesser ? Au-delà de leur trahison, leur lien était toujours aussi fort. Cette faiblesse fut vite remplacée par une expression impassible alors qu’ils gagnaient le centre de la pièce.

     

    D’un claquement de doigt, Carole fit apparaître Alex. Je dus serrer les dents pour éviter de crier. Ils l’avaient contre le mur, il était inconscient et encore blessé par l’explosion plus tôt.

     

    - Nous aurions préféré éviter en arriver là mais c’était nécessaire pour t’attirer Lana.

    - Et surtout que les chefs de l’Alliance te suivent par peur de la vérité.

     

    Clement était toujours dans le mal par rapport à son utilisation de capacité. Dylan le soutenait, les dents serrés. Il semblait en colère contre les deux et finit même par leur répondre.

     

    - Cela ne sert à rien de ramener cela ! Vous ne faîtes que blesser des gens.

    - Je crois que ç’a déjà été fait.

     

    Le sourire tranchant de Carole renforça sa colère et, au-delà, je pouvais sentir de l’amertume, du dépit.

     

    - Nous n’avons pratiquement rien fait.

    - Rien fait ? Vous avez assassiné nos deux familles entières ! Cria Yan, le self-control totalement perdu.

     

    Il commença à s’avancer vers nous mais fut retenu par Carole qui le toisait d’un air sévère. Yeux dans les yeux, ils se comprenaient mieux que quiconque.

     

    - À dix-sept ans, tu commences à voir la valeur de la vie et c’est d’autant plus vrai quand toute ta famille se fait tuer sous tes yeux sans que tu ne puisses rien faire.

    - Alors vous autres ? Comment vous sentez-vous en sachant que ceux à votre tête sont des menteurs et des assassins ?

     

    Le silence planait entre nous. Mes compagnons se fixaient en chien de faïence. Bien que j’aurais dû m’en soucier, je ne pouvais que regarder Alex. Alex, Alex et ses beaux yeux qui commençaient à s’ouvrir lentement.

     

    - Savez-vous pourquoi sommes-nous leurs chef ? Auparavant nous étions de simples membres. Nous faisions partis de l’un des seuls duos amis le meilleur d’un alliance précaire et fragile.

     

    Dylan allongea Clement, qui avait fermé les yeux, au sol et s’accroupit à ses côtés. Il passa sa main sur son front et dans ses cheveux doucement.

     

    -  Nous nous entendions beaucoup trop bien. Et les membres des deux groupes commençaient à se rebeller. Les chefs savaient leur fin proche alors ils se devaient d’élire deux nouvelles têtes, deux boucs émissaires.

     

    Alex avait les yeux entièrement ouverts. Confus, il regardait tout autour de lui, une expression douloureuse sur le visage. Ses ravisseurs, trop pris dans la conversation, ne l’avaient pas remarqué.

     

    Je captai son regard et murmurai « je vais te sortir de là », en sachant qu’ils pouvaient lire sur mes lèvres.

     

    - Nous deux bien sûr. Et ils nous menacèrent l’un par rapport à l’autre, nous rendant obligé de leur obéir. Notre supplice s’est fini à la perte de vos familles, nous les avons tués.

     

    Je ne me souvenais pas réellement de ça. Peut-être que mes souvenirs étaient trop vieux. Mais c’était vrai qu’après cette mission Sean et Melin, les anciens chefs du Clan et de l’Association, avaient totalement disparu.

     

    - Les personnes que vous devriez blâmer sont parties depuis longtemps. Alors cette rage, cette colère, manque de justification.

    - Tais toi ! Cela ne change rien à ce que vous avez fait !

    - Si, ça change beaucoup de choses.

     

    Ils se tournèrent vers Clara qui venait de prendre la parole. Elle les regardait, la lèvre tremblante. Le mystère ultime de son passé venait d’être révélé et elle ne contenait aucune rancune. Elle était parfaitement calme.

     

    - Je pense que … vous avez tous déjà assez soufferts comme ça. Les uns comme les autres. Alors finissons-en avec cette histoire, arrêtons-nous là.

     

    Elle pardonnait à Clement et Dylan. Elle, une victime principale de toute cette histoire. L’une des uniques rescapés du massacre du Serpent. Pour moi, c’était amplement suffisant. Et je n’étais pas la seule à penser ainsi car Edgar lâcha nonchalamment, à son tour, une phrase.

     

    - Bon je crois que c’est réglé.

    - De toute façon, je ne pourrais jamais juger Clem vu qu’il m’a sauvé et Dylan ne me concerne pas vraiment. Ajouta Alban avec empathie.

     

    Ils se placèrent aux côtés des chefs de l’Alliance et de Clara. Liska fit quelques pas et se plaça aussi avec eux. Ellie et Tyan suivirent.

     

    - Non, non ! Vous ne comprenez rien. Et puisque vous supportez cette injustice alors vous aurez le châtiment qui va avec. « Ténèbres » !


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  •  

    - Ne fait pas ça ! S’écria aussitôt Carole.

     

    Le fait que les yeux de Yan avaient viré au rouge à l’instant ne m’avait pas échappé. Ce n’était pas vraiment moi ? Il était manipulé. Il repoussa Carole d’un geste. Des ombres se mouvèrent et, pour je ne sais quelle raison, elle fut éjectée contre un mur violemment.

     

    - Yan … entendis-je Liska murmurer.

     

    Tout se passa en un instant. Elle se plaça devant nous tous alors qu’une ombre se déplaça sur le sol. À ce moment précis, notre attaquant remarqua sa présence et cria à sa capacité de s’arrêter tandis que Liska murmurait quelque chose.

     

    Les ténèbres la frappèrent de plein fouet. Elle fut projetée. Son corps, je le remarquai alors qu’elle se relevait difficilement, avait été lacéré. Ses jambes surtout, son ventre et ses bras, moins. Un éclair de lumière traversa la pièce.

     

    Une marque bien particulière apparut sur son sternum. Un cœur dont le milieu était séparé horizontalement par une barre blanche. Je tournai la tête. La même marque était au même endroit sur Yan et sur, je le devinai, Carole.

     

    Liska venait d’utiliser sa capacité « Lien ». Des blessures, les mêmes qu’elle, commençaient à apparaître sur les deux.

     

    - Arrête Liska ! Carole est déjà trop blessée, elle va en mourir ! Lui cria Carla qui avait déjà analysé la situation.

     

    Les yeux de l’utilisatrice clignèrent un instant en rouge. Pourquoi ? Qui était derrière tout ça ?

     

    - Edgar, s’il te plaît ! Réagissais-je à mon tour.

     

    Il se rua sur elle et utilisa sa capacité. Son écho de pouvoir se répandit dans toute la pièce, annihilant tout pouvoir. Ce n’était que temporaire mais au moins ils n’étaient plus contrôlés par rien. Elle s’effondra dans ses bras.

     

    Yan chancela un peu aussi mais fut vite rattrapé par sa situation et courut vers Carole.

     

    - Ellie, Tyan, pouvez-vous aller délivrer Alex ?

    - Okay.

    - Bien sûr !

     

    Je m’avançai à mon tour vers mes deux amis, les deux « traîtres ». Je ne le prenais pas personnellement. Après tout, cela n’avait jamais été dirigé contre moi et e comprenais bien le désir de vengeance.

     

    - Désolée. Je ne suis pas à la hauteur. Lana, tu as été … gentille avec nous. On t’a trahi. Ne blâme pas Yan s’il te plaît.

    - Ce n’était pas mon attention. Vous serez toujours les bienvenus- l’Empire est votre maison aussi, je-

     

    Les mots me manquaient. J’avais l’impression que je n’avais plus le temps. Je cherchais et cherchais mais ne trouvais que du silence. La tristesse était trop forte et elle me prenait à la gorge, me rendant incapable de parler.

     

    - Tout ira bien Lana. Tu es celle dont ils ont tous besoin. Tu ne peux pas toujours sauver tout le monde mais ce n’est pas grave …

    - Qu’est-ce que tu racontes ?

    - Merci à toi. Yan … choisis d’être heureux. Reste avec Liska et-

     

    Elle se figea. Son regard se voila. Sa volonté, sa vie, quittant son corps. Je n’arrivai pas à le croire, c’était impossible. Le même sentiment qu’avec Ellie et Tyan. Mon cœur chuta dans ma poitrine alors que je n’étais pas encore prête à l’abandonner.

     

    Il n’y avait plus aucun pouvoir possible à utiliser et pourtant je tendis quand même ma main vers son corps dans l’espoir de réussir. En vain. Il devait rester quelque chose à faire. Je pouvais la sauver, j’étais l’Imperater ! Mon pouvoir ne pouvait-il pas être utile autrement qu’au titre pour une fois ?!

     

    Aucune magie n’affluait rien. J’essayai, encore et encore, mais j’échouai. Malgré tout ce que j’avais déjà parcouru, je n’étais pas assez forte pour elle.

     

    Yan abaissa ma main doucement.

     

    - Non … c’est fini Lana. Au fond d’elle, elle le savait aussi. Tu ne pouvais rien faire. Elle est morte mais ce n’est pas ta faute. En quelque sorte, elle avait décidé de mourir…

    - Pourquoi ?!

    - Pour moi je crois. Pour que je ne culpabilise pas, pour avoir tout sur son dos ou … ou je ne sais pas.

     

    Une larme roula sur sa joue sans qu’il ne fasse rien pour l’essuyer. Je me sentais un peu vide. Une part de moi se repassait les moments partagés à ses côtés. Les moments heureux ou même tristes, où nous avions affronté nos soucis ensemble.

     

    Pas celui-là. Pas cette histoire. Pourquoi est-ce qu’ils ne m’en avaient jamais parlé ? Pourquoi avait-il fallu que tout se finisse ainsi ?

     

    C’était trop dur de s’habituer à l’idée que l’on ne reverrait plus jamais quelqu’un. On avait toujours cette impression qu’il allait revenir mais non. Elle ne se relèvera jamais plus.

     

    - Ce n’est pas non plus de ta faute Yan. Quelqu’un était là.

    - On cherche toujours un coupable autre que soi-même. D’une certaine manière, j’ai accepté les idées qui se sont proposées dans ma tête alors inflige-moi la sentence que je mérite.

    - Carole et de nombreuses personnes ont déjà assez payé le prix de cette histoire. Liska va être effondrée en apprenant la nouvelle, elle aura besoin de toi.

     

    Il acquiesça doucement. Il semblait refuser de quitter le corps de Carole des yeux. Malgré tout ce que la défunte avait dit, il avait l’air de se sentir toujours aussi anéanti, coupable. Je luis tendis ma main.

     

    - Hey, rentrons à la maison.

    - Oui.

     

    Il la saisit et se releva. Après une courte hésitation, il prit Carole dans ses bras. Nous rentions. Une personne en moins, un corps en plus. Un enterrement à organiser, un vide dans le cœur à ajouter.

     

    - On va conserver son corps en attendant que tout soit prêt.

    - D’accord, merci Calys.

     

    Elle hocha la tête et allongea la morte sur la table de sa salle. Je sortis du laboratoire. Je n’y mettais jamais les pieds alors que tout une branche y était dédiée et elle ne contenait pas que des salles mortuaires ou des lieux pour expérience.

     

    Personne ne voulait jamais y aller. Ce n’était pas vraiment utile. La plupart du temps, se rendre à cette partie du bâtiment signifiait un nouveau décès. Calys, en revanche, quand elle n’avait personne à soigner, s’y rendait pour pratiquer des expérimentations.

     

    Je ne l’avais jamais vue faire de mes propres yeux mais je ne m’en portais pas plus mal.

     

    Je retournai à l’infirmerie. Yan et Liska étaient endormis l’un dans les bras de l’autre, ils avaient sûrement pleuré ensemble. J’étais pleine d’amertume de ne pas avoir pu sauver Carole et ses dernières paroles n’arrêtaient pas de tourner en boucle dans ma tête.

     

    « Tout ira bien Lana. Tu es celle dont ils ont tous besoin. Tu ne peux pas toujours sauver tout le monde mais ce n’est pas grave … »

     

    Je m’avançai encore un peu et trouvai Alex. Ellie et Tyan était à son chevet. En me voyant, le visage de mon petit-ami s’illumina. Je m’assis sur le bord de son lit et il m’enserra de ses bras, comme aillant senti ma tristesse.

     

    - Désolée de ne pas avoir pu venir plus tôt, il me restait une affaire à régler.

    - Je sais, ne t’en fais pas pour ça. Surtout, tu vas bien Lana ?

     

    J’étais surprise par sa question. Il semblait avoir pu lire en moi comme souvent. Cela me faisait plaisir mais rire que ce soit lui qui me pose la question.

     

    - C’est à toi que cette question devrait être posée !

    - Mais ça va, les blessures étaient moins graves qu’elles en avaient l’air.

    - Tant mieux.

     

    Il déposa un baiser sur mon front et je ne pus m’empêcher de rougir face à tant de tendresse. On frappa à l’infirmerie et Lukas entra sans attendre, un air contrarié sur le visage.

     

    - Lana ! Tu aurais dû me faire venir avec vous !

    - Désolée je n’y ai pas pensé.

     

    Il poussa un soupir profond et son air s’adoucit. Il m’avait crue, heureusement. C’était évidemment un choix de ma part. Je ne lui faisais plus assez confiance depuis que sa véritable identité avait été révélée. Il était mon ami, c’était sûr, mais j’avais un mauvais sentiment.

     

    - Aussi Calys m’a demandé de te donner ça. C’était dans la poche de Carole.

     

    Il me tendit un papier que je m’empressai de déplier. Il n’y avait pas grand-chose d’écrit. Juste une phrase.

     

    « On nous observe. »


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