• Chapitre 34 - Kagami, le Destructeur

    Kagami soupira. La base était vide et lugubre comme lui d'une certaine manière. Il ouvrit la porte pour se rendre sur son balcon. D'ici, la forêt immense et triste s'étendait de tout son long.

     

    Solitude.

     

    Tout en était teint. Il n'y avait plus aucune émotion positive chez lui. Il restait de la colère, de l'amertume, de la douleur et des sentiments refoulés. Il était comme mort à l'intérieur même s'il ne se qualifiait pas du tout ainsi.

     

    Le Destructeur avait pris un peu trop de place sur Kagami et maintenant la personnalité du garçon devenait instable. La lutte pour le corps continuait toujours. Malgré cela, et au vu de leur connexion, ils pouvaient tous deux sentir les émotions de l'autre.

    C'était perturbant et dur de ne pas y céder.

     

    Kagami ne voulait pas disparaître, il refusait la raison pour laquelle il était né.

    Le Destructeur ne voulait pas disparaître, il refusait de laisser la place qui lui revenait de droit.

     

    Il fit donc taire les voix dans sa tête et pris l'emprise sur l'enveloppe corporelle. Là, sur le balcon, en totale possession de ses moyens à nouveau, il prit une grande respiration. Au loin, la base de l'Alliance était légèrement visible.

     

    Se souvenir des Impereurs suffisait à raviver sa colère au milieu du calme et du silence qu'étaient ces bois, ce château. Le renflouement de ces sombres sentiments ramena à sa mémoire toutes les années vécues.

     

    Chaque réincarnation et ses dégâts engendrés, le sentiment de son hôte se fissurant petit à petit.

     

    C'était toujours insupportable à ressentir mais il ne pouvait jamais empêcher cela de se produire. Il était trop puissant pour être contenu et l'âme de l'humain finissait souvent écrasée par le pouvoir peu importe à quel point sa volonté était forte. Ils étaient morts.

     

    Cela commençait par une briefe émotion étrange, une sorte de … perte. Puis l'hôte ne lui parlait plus et disparaissait.

     

    Kagami était de loin celui qui avait tenu le plus longtemps. Il se battait contre lui et, en quelque sorte, cela réussissait à balancer sa personnalité, à la garder équilibrée. Il y avait ce goût de trahison trop présent quand il avait tué ou avait été tué.

     

    Une tristesse infinie bien cachée derrière l'amertume. Une peine pourtant assez forte pour qu'une larme roule sur sa joue. Celle du Pacificateur, présent sans l'être, et du Destructeur, dont l'âme corrompue ne gérait pas bien l'afflux d'émotions trop pures.

     

    Son corps fut pris d'un violent frisson.

     

    - Eh bien, cette vue est rafraîchissante !

     

    Le Créateur. Il était là. Le seul qui ne l'avait jamais abandonné, qui était de son côté. Le Destructeur essuya rapidement l'unique larme et se tourna vers son ami.

     

    - Je ne pensais pas que tu viendrais me voir si vite !

    - J'avais un cadeau à t'offrir.

     

    Alors, il lui tendit une page de livre. Il fronça les sourcils avant de reconnaître qu'elle venait de l'Ombre-Lumière. Un sourire audacieux se glissa sur son visage.

     

    - Avec ça, tu pourras invoquer ton armée. Je ne peux pas t'offrir plus qu'un vœu. Son pouvoir est trop dur à conserver hors du livre.

     

    Il se saisit de la feuille de papier blanc et laissa la puissance affluer et l'envahir doucement. C'était très agréable. Il se dirigea vers le deuxième balcon, celui qui menait à la cour intérieure, suivit de près par le Créateur.

     

    - Fragment, fais renaître mon armée.

     

    NON. TU NE DEVRAIS PAS M'AVOIR. A PART SI …

     

    - Je suis là ? Reprit le Créateur.

     

    SOUHAIT ACCORDE.

     

    Une lumière apparut au milieu de la cour. Elle se répandit dans les moindres recoins et, aussitôt, en surgit des soldats. Ils n'étaient pas totalement humains ; leurs corps étaient difformes, tordus. Ils sortaient de l'outre-tombe.

     

    Ramenés à la vie par une volonté qui n'était pas leurs, par le destin, les laissant pleins d'amertume et de colère. Comme le Destructeur.

     

    - Cher armée ! Nous revoilà réunis pour notre guerre, notre moment ! Laissez vos sentiments néfastes s'exprimer et c'est avec rage et colère que nous vaincrons !

     

    Des cris résonnèrent à la suite de son discours et il rentra dans sa salle de trône. Un applaudissement le surprit. C'était toujours le Créateur. Évidemment, il n'y avait qu'eux ici.

     

    - Magnifique. Tu as vraiment un don pour diriger les foules, mon cher Destructeur. Mais sur ce, je vais devoir partir.

    - Déjà ? Ne peux-tu pas un peu me tenir compagnie ? Je suis si seul …

     

    Il le serra dans ses bras. Il s'ennuyait déjà de son absence. Surtout, et bien qu'il ne l'avouerait jamais, il avait peur de cette solitude qui lui collait à sa peau. Et de ce à quoi elle pouvait le faire réfléchir. C'était toujours ainsi. Il était seul donc il pensait beaucoup trop.

     

    Le Destructeur savait bien qu'il allait reprendre sa place auprès de lui à la fin mais cela voulait dire qu'il allait encore devoir attendre. Seul. Le Créateur rit face à son attitude enfantine et déposa un baiser léger sur le front de son compagnon.

     

    - Les autres vont se douter de quelque chose sinon. Allez, lâche moi. Je te reviendrai …

    - Très bien.

     

    Le plan avant tout. La mort dans l'âme, il l'accompagna jusqu'à l'entrée de la barrière protectrice installée juste avant la déclaration de guerre par ses propres soins. Ce ne fut que lorsque son ami eut totalement disparu de son champ de vision qu'il s'autorisa à regagner le château.

     

    Juste avant, un instinct le prit et il se retourna. Une file passa devant lui. Elle lui disait quelque chose avec sa robe longue et son air impassible. Il fouilla un instant dans sa mémoire et elle disparut.

     

    Peu importe.

     

    Il se retourna pour réellement rentrer dans la base. Il avait d'autres choses à faire. Quelques minutes plus tard, cette fille était déjà sortie de son esprit.


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